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Matteo Pasqualin, l’encre comme un fusain
« J’espère un jour devenir un grand artiste réaliste en noir et gris », confiait à l’envi Matteo Pasqualin aux intervieweurs et aux clients. La modestie honore cet artiste (presque) quarantenaire et dont l’aura artistique s’étoffe un peu plus chaque année. Après avoir raflé plusieurs prix aux prestigieuses conventions de Londres et de Rome, Matteo vient en effet de remporter un autre prix d’importance, le Chaudesaigues Award pour l’ensemble de son travail. Un césar d’honneur ? Un peu davantage, puisqu’il s’agit de la seule distinction dans le monde du tatouage qui considère une œuvre dans son ensemble, un parcours et pas une pièce unique. Tout juste lauréat, Matteo Pasqualin devrait connaître un pic de notoriété, encore que les vrais fans le connaissent déjà bien. Tattoos.fr en profite pour dresser son portrait.
C’est moi, c’est l’Italien
Les années 1970 en Italie, des années de plomb - Giulio Andreotti, les assassinats politiques, les brigades rouges. Une ambiance lourde. C’est dans le Nord de la péninsule, du côté de Venise que naît Matteo Pasqualin en 1974. La zone est encore très industrielle, même si Venise elle-même est protégée par son statut de ville musée. Matteo va à l’école, étudie, mais ce qu’il retient surtout de cette époque, c’est bien sûr le dessin. Dès l’enfance, il prend plaisir à représenter le monde extérieur à l’aide de ses crayons ou bien de ses fusains. Dès le départ, son univers se développe en noir et blanc – plus tard il dira noir et gris. Électricien au début des années 1990, Matteo travaille à l’usine pendant six ans. Il ne s’y ennuie pas, mais poursuit ses travaux sur papier et sur toile. Peu à peu, Matteo Pasqualin s’intéresse à d’autres formes de représentations, dont la peinture à l’huile à laquelle il se familiarise par goût du défi. Et bien sûr au tatouage.
Pégase
En Vénétie, alors, il n’existe guère qu’un seul atelier de tatouage ayant pignon sur rue. Matteo a 18 ans et s’intéresse à tout. Avec quelques amis, il se rend au studio et, sans y réfléchir, demande à se faire encrer un Pégase. C’est son premier contact avec le métier qu’il ne tardera pas à exercer. Voyant autour de lui la demande de tatouage augmenter fortement, il se met à apprendre les rudiments de l’encrage et travaille pour des amis. L’un d’eux est employé au studio de tatouage où Matteo s’est fait encrer Pégase. Il lui demande quelques tuyaux et, de fil en aiguille, finit par se faire embaucher. La boucle est bouclée. Matteo quitte l’usine et se lance dans une aventure un peu folle selon son entourage.
Premier studio, premiers succès
L’histoire est chaotique. Les relations de Matteo avec son patron se détériorent au fil des mois. Ils n’ont pas de feeling artistique. Au bout de deux ans, Matteo Pasqualin s’installe à son compte, dans la ville de Porto Viro. C’est une ville étudiante, accueillant beaucoup d’alternatifs : Matteo compte sur cette population pour pouvoir s’aventurer dans des domaines plus excitants que les simples petite pièces de flash. Une intuition payante. Matteo’s tattoo, son premier studio, affiche complet. Et, naturellement, c’est dans un plus grand local, qu’il nomme The Inkers, que finit par s’installer Matteo Pasqualin.
Parallèlement, dans la scène émergente du tatouage transalpin, Matteo se fait un nom. On l’invite aux conventions nationales où son travail se fait vite remarquer. Matteo n’en manque pas une. Les prix commencent à se bousculer et, tout naturellement, Matteo Pasqualin acquiert un nouveau statut qui lui donne accès aux conventions internationales : Frankfort, Miami, Budapest et Londres. À Rome puis à Londres, ses tatouages noir et gris lui valent deux prix Best of Show... Et encore un autre à la convention milanaise 2012. Toujours à l’affût de nouvelles techniques et de nouveaux savoirs, il échange beaucoup lors de ces conventions, notamment avec les tatoueurs qu’il admire : Carlos Torres, Den Yakovlev, ou encore Dmitriy Samohin.
Cette belle carrière a éveillé l’intérêt des jurys du Chaudesaigues Award (Alex de Pase, Shane O'Neill, Nikko Hurtado et Mike Devries) qui lui ont attribué en 2013 le trophée du concours, pour l’ensemble de son travail lors de la convention de Naples et en présence d'Alex de Pase et de Joe Capobianco, memebre d'honneur de l'Award.
Steven Chaudesaigues, Matteo Pasqualin et Stéphane Chaudesaigues, Naples 2013
Atypique et méticuleux
Fasciné par l’image en noir et blanc, il prend plaisir à reproduire les scènes dans leurs moindres détails, fignoler pendant des heures ses compositions. Pour lui, c’est une question d’équilibre. Avec son jeu sur les contrastes en noir et gris, il dispose d’une impressionnante palette de tons qui font la richesse et la beauté de ses réalisations. Il demande aux clients qui le visitent de lui fournir des photos très détaillées et contrastées du motif qu’ils voudraient se faire encrer ou de l’univers visuel dans lequel ils le placent. Ce jeu d’allers-retours entre la photographie et l’image dessinée est l’un des traits remarquables du travail de Matteo Pasqualin.
Reproduire jusqu’à l’extrême petit détail sans pour autant perdre son style. Un équilibre que beaucoup de tatoueurs lui envient. Matteo se définit lui-même comme un obsessionnel, un atypique. Sa place à part, dans le tatouage, il la ressent parfois lors des conventions : impossible pour lui de tatouer comme certains sur fond de musique métal. Mais s’il se distingue, ce n’est pas pour s’écarter du groupe. Auprès des autres tatoueurs de sa génération, Matteo se sait en famille ; sa singularité fait bien sûr sa richesse.
Matteo Pasqualin, bientôt en France pour le Festival International du Tatouage de Chaudes-Aigues
Matteo Pasqualin fera le déplacement jusqu’à Chaudes-Aigues, dans le Cantal, pour le Festival International du Tatouage organisé par le Stéphane du même nom (Chaudesaigues) les 5, 6 et 7 juillet prochains. Vous pouvez réserver un créneau pour vous faire tatouer par Matteo à cette occasion sur le site de l’événement : mais attention, les places s’arrachent.
Trouver Matteo
Inkers Tattoo Shop
Via della vittoria 2a
45014 Porto Viro, Italie
Tél. 0039 347 465 7795