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Tatouage et politique

Francisco de Narvaez
John Fetterman

Tatouage et politique sont intimement liés dans la représentation contestataire que l’on peut s’en faire, bien que le monde politique, en France du moins, soit assez éloigné de celui du tatouage. Retour à la fois sur l’histoire des tatoués en politique et de l’iconographie politique dans l’histoire de l’art corporel.

 

Les politiques et le tatouage : en France, motus et bouche cousue

Officiellement, nous n’en savons rien. Impossible de trouver la trace d’une personnalité politique affirmant porter un tatouage. De manière générale, le sujet n’est pas une priorité de l’agenda politique : il a fallu atteindre 2008 pour que les premières réglementations d’encadrement sanitaire à destination des studios soient promulguées. Néanmoins, il n’est pas impossible que certains députés, sénateurs ou responsables de parti portent des tatouages, à commencer par ceux issus de la gauche radicale de l’après mai 68 ou encore les anciens membres de l’armée.

 

Et à l’international ?

Sur le continent Américain, la problématique se pose différemment. Le port d’un tatouage n’y est pas nécessairement perçu comme une preuve d’irresponsabilité. On a par exemple beaucoup fantasmé aux Etats-Unis sur le prétendu tatouage de George W. Bush, qu’il porterait sur le bras… Une rumeur qui n’a jamais été confirmée. Ni démentie.

Cette différence de traitement s’explique en partie par l’avance prise dans le monde anglo-saxon en matière d’acceptation du tatouage, mais également par la constitution  même du corps politique américain où l’élitisme n’est pas toujours de rigueur. Les Américains ont bien élu Ronald Reagan, un ancien acteur de westerns, à la présidence de la République ! Le rapport à la responsabilité publique n’est pas le même des deux côtés de l’Atlantique et cela bénéficie aux porteurs de tatouage.

En Amérique du Sud, d’ailleurs, l’instabilité des régimes au cours du XX° siècle et l’arrivée au pouvoir de dissidents contestataires a joué un rôle similaire dans l’acceptation du tatouage dans la représentation publique. Francisco de Narvaez, responsable d’Union-Pro, un parti conservateur argentin, a ainsi remporté l’équivalent des législatives en 2009 malgré le tatouage chinois qu’il arbore sur le cou… Sans être inimaginable en France, un tel événement semble pour l’heure improbable.

 

Petit historique des hommes politiques tatoués dans le monde anglo-saxon

Une autre explication possible de l’avance du monde anglo-saxon tient sans doute à l’histoire. Winston Churchill, incarnation absolue du modèle politique britannique, portait en effet une ancre sur son bras droit. Plus étonnant, Theodore Roosevelt avait hérité de sa carrière militaire une image très détaillée de sa famille sur sa poitrine

Aujourd’hui, John Fetterman, maire d’une petite ville de Pennsylvanie et souvent désigné par les journaux comme « Le maire le plus cool d’Amérique », porte sur son bras droit le code postal de sa ville ; sur son bras gauche, il a fait encrer les dates de morts de ses concitoyens disparus dans des accidents ou des incendies depuis qu’il s’est emparé de la mairie. Une manière de leur rendre hommage.

 

L’iconographie politique chez le commun des mortels

Si les hommes politiques tatoués ne sont pas légion, en revanche il existe indubitablement une composante politique du tatouage. D’abord par l’imagerie commémorative : le Che est l’un des portraits les plus souvent demandés, ainsi que Castro, Lenine, Zapata, Churchill, Trotski ou plus rarement Hitler. Ensuite par les symboles patriotiques ou les phrases revendicatives, comme « Ni Dieu, ni Maître ».

Une iconographie souvent contestataire qui correspond aussi aux origines du tatouage, dans la marginalité des milieux de marins, bandits et autres forçats. Malgré la normalisation du tatouage, cette pratique continue à se perpétrer et la dimension esthétique du tatouage n’a pas tout à fait occulté son emprise symbolique et politique. 

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